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par Billard et alii, 2014).
Un point doit être souligné. La recommandation
du conseil de l’Europe précise que les protections
octroyées ne doivent pas porter atteinte
« aux règles
bien établies et reconnues garantissant la protection
du secret professionnel ».
Il faudrait alors demeurer
vigilant au fait que les conditions de la protection du
secret professionnel restent compatibles avec celle
des lanceurs d’alerte.
PROPOSITION
7
AVANCER VERS LE PRINCIPE
DE TAXATION UNITAIRE
Comme l’explique très clairement les experts de
la société civile réunis dans le BEPS Monitoriung
Group, la cause sous-jacente de l’érosion des bases
fiscales est le principe d’entité séparée appliqué aux
différentes filiales d’une multinationale. Ce principe
« insiste sur le traitement des opérations nationales
d’entreprises multinationales comme si elles étaient
indépendantes les unes des autres, alors qu’en réalité
elles fonctionnent comme un tout intégré sous une
direction centrale. Ce principe crée une incitation
perverse pour les multinationales à s’organiser en
ensemble de sociétés complexes avec souvent des
centaines de filiales dont plusieurs sont enregistrées
dans les juridictions utiles pour faciliter l’érosion des
bases fiscales et le transfert de bénéfices ».
Dans un document de travail publié en novembre
2014, Alex Cobham et Simon Loretz présente une
proposition alternative de taxation unitaire mise en
avant par le professeur et expert fiscal Sol Picciotto :
cela consiste à « traiter chaque groupe multinational
d’entreprises comme une unité, indépendamment
de l’emplacement géographique et juridique des
filiales ; le calcul du bénéfice et des pertes s’effectue
à l’échelle du groupe puis le résultat est attribué aux
différents territoires en fonction de l’activité écono-
mique réelle qui y est réalisée ». Les auteurs nous
rappellent que ce genre de systèmes d’imposition
unitaire avec formule de répartition n’existe actuelle-
ment qu’au niveau national aux États-Unis, au Cana-
da, en Suisse et - pour une taxe locale - en Allemagne.
Cobham et Loretz ont utilisé une base de données
couvrant 211 360 entreprises individuelles apparte-
nant à 26 795 sociétés pour tenter d’évaluer quelles
seraient les conséquences de l’adoption d’un sys-
tème de taxation unitaire. Leur travail conduit à cinq
conclusions importantes pour les partisans de cette
alternative: 1) il n’existe pas de formule évidente,
qu’elle soit fondée sur les actifs, le chiffre d’affaires ou
le nombre d’employés, qui rende compte objective-
ment de l’emplacement de l’activité économique ; 2)
la conception exacte du mécanisme de répartition est
cruciale pour la redistribution de la base d’imposition
des sociétés entre les pays ; mais 3) le système pro-
duit ce pourquoi il est fait, la base d’imposition des
sociétés se déplace de pays comme le Luxembourg,
les Pays-Bas ou l’Irlande vers les pays d’imposition
plus élevés ; 4) mais l’introduction de la consolidation
des comptes amène à réduire la base globale d’impo-
sition des sociétés de manière significative, de plus de
10 pour cent ; 5) le résultat le plus clair de cette étude,
concluent les auteurs, est qu’il n’y a pas suffisamment
de données pour effectuer une analyse complète des
répercussions sur la redistribution des recettes d’un
passage à la taxation unitaire.
La taxation unitaire est la réponse la plus satis-
faisante intellectuellement à l’érosion des bases
fiscales due aux multinationales.
Elles sont gérées
comme une seule unité et doivent être traités fis-
calement comme telles. Pourtant,
la proposition
nécessite plus de travail technique pour établir une
formule de répartition appropriée ; et du travail po-
litique compte tenu de l’importance de la redistri-
bution induite.
Pour le professeur Reuven Avi-Yonah,
si l’adoption du reporting pays-par-pays peut être une
base pour la mise en œuvre de la taxation unitaire, la
transition « est susceptible d’être un long processus ».
PROPOSITION
8
L’UNION EUROPÉENNE DOIT ÉVOLUER VERS
UNE BASE COMMUNE CONSOLIDÉE
Depuis 2001, la Commission européenne pousse à