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COMBATTRE LES PARADIS FISCAUX |

CE QUI A ÉTÉ FAIT -

CE QUI DEVRAIT ÊTRE FAIT

IV – 10 PROPOSITIONS POUR ALLER PLUS LOIN : 2015 ET AU-DELÀ

l’harmonisation des assiettes fiscales de l’impôt sur

les sociétés avec le projet de Directive ACCIS (assiette

commune consolidée pour l’impôt des sociétés).

Les multinationales établies dans plusieurs pays de

l’Union établissent leurs comptes et payent leurs

impôts dans chaque pays d’implantation. Elles ont

alors tendance à faire apparaître leurs profits dans

les pays les moins taxés. Une base fiscale consoli-

dée, établie au niveau européen, rendrait ce genre

de comportement impossible. Les profits du groupe

seraient taxés en une seule fois et le produit de la taxe

redistribué entre les différents pays d’implantation

selon des critères à déterminer comme dans le cas de

la taxation unitaire au niveau mondial (quantité de

capital investi, chiffre d’affaires, nombre de personnes

employées…).

Si le principe est intéressant,

le projet européen

souffre de deux grosses faiblesses : aucun taux

minimal n’est prévu une fois l’assiette commune

établie et le régime est optionnel.

Cela signifie

que les seules entreprises qui passeront au régime

consolidée seront uniquement celles qui pourront en

profiter pour payer moins d’impôt sur les sociétés.

Une véritable avancée en la matière réclame de fixer

un taux plancher et une forme de serpent fiscal euro-

péen qui fixerait des bornes aux écarts possibles de

taux comme le serpent monétaire européen limitait

les variations possibles des taux de change entre

devises européennes.

L’Europe demeure aujourd’hui une zone de concur-

rence fiscale très élevée entre les pays.

Une situation

de refus d’harmonisation qui résulte de la volonté

des Etats membres de protéger leur souveraineté

fiscale… alors même que le projet BEPS souligne

à quel point « plus aucun d’entre eux n’est capable

d’imposer ses entreprises de la façon qu’il le souhaite

sans que celles-ci trouvent d’autres manières de se

structurer pour y échapper. Le premier obstacle à

lever est de faire comprendre aux Etats membres

qu’ils auraient davantage de souveraineté collective-

ment s’ils acceptaient d’aller vers l’harmonisation »

explique l’ancien Directeur des analyses et politiques

fiscales à la Commission européenne, Michel Aujean.

L’expert plaide pour que l’Allemagne et la France

fasse le premier pas en la matière. A ses yeux, l’Es-

pagne et l’Italie rejoindraient assez vite le projet, ainsi

que plusieurs pays nordiques et du Benelux. Peut-être

de quoi établir une coopération renforcée qui permet-

trait de tester cette évolution vers une fiscalisation

des sociétés plus adaptée.

PROPOSITION

9

UN PRINCIPE EUROPÉEN D’ANTI ABUS

En 2012, la Commission européenne a recommandé

aux Etats membres d’adopter dans leur législation

nationale une clause générale anti-abus dont le

principe est simple : elle donne le droit à une autorité

fiscale nationale d’ignorer dans le calcul de l’impôt

d’une entreprise toute opération qui lui paraît avoir

été menée de manière artificielle, c’est-à-dire unique-

ment pour des raisons d’optimisation fiscale agres-

sive. Dans les mots de la Commission: « An artificial

arrangement or an artificial series of arrangements

which has been put into place for the essential pur-

pose of avoiding taxation and leads to a tax benefit

shall be ignored. National authorities shall treat these

arrangements for tax purposes by reference to their

economic substance».

Plusieurs pays disposent déjà de ce genre de clause

générale dans leur arsenal juridique national (voir

tableau ci-dessous). Mais elles ne recouvrent pas

toutes le même périmètre et ne donnent pas les

mêmes pouvoirs aux autorités fiscales. Selon l’expert

Richard Murphy,

une clause européenne harmonisée

devrait comporter au minimum trois caractéristiques

importantes : la charge de la preuve de l’innocuité de

l’opération en doute doit reposer sur le contribuable

; celui-ci doit pouvoir présenter sa transaction à

l’administration fiscale s’il a un doute réel sur son ac-

ceptation et la faire valider de manière transparente ;

des pénalités claires doivent être prévues à l’encontre

des contribuables qui tomberaient sous le coup de la

clause.

Ce genre de clause générale peut permettre aux